lundi 27 juin 2011

93 - HAUTEURS DE L'ÂME

LES BEAUTÉS PURES
De la poussière pour atteindre le Ciel
Mademoiselle,

Je vous ai aimée dans la clarté sereine d'un humble vitrail d'église.
A l'heure où je vous écris, à peine sorti de cette église, je me sens intimement uni à vous, illuminé par le souvenir de cette pauvre clarté. Je vous ai rejointe dans les hauteurs pures de l'âme en éveil, là où s'exprime l'amour plein d'éclat. Laissez-moi vous raconter...
J'étais seul dans cette église triste, assis sur un banc, attentif au jeu étrange de la poussière dans un soudain rai de lumière. C'était le croisement de deux mondes. La lumière d'en haut descendue à la rencontre de la poussière issue de la terre pour former ce brouillard ne matérialise-t-elle pas l'esprit vivant, l'âme mouvante ?
Comment de simples particules de poussières dans un rayon de soleil dévié par un vitrail anodin pouvaient-elles remettre en question tant de certitudes terrestres, faire bouger des montagnes d'habitudes matérialistes ? Ces choses apparemment insignifiantes me remuaient profondément cependant. Pas un bruit ne se faisait entendre dans l'église.
Le calme était solennel, la fraîcheur apaisante. Dehors les feux de l'astre accablaient la petite cité. De loin en loin j'entendais le passage des voitures sur la route, comme si elles n'étaient plus que de vagues intruses. Puis je ne les entendis plus. Elles ne faisaient plus partie de mon monde : j'étais déjà loin.
Alors, toujours assis sur le banc, imperceptiblement mon visage s'est retrouvé baigné dans ce bain de poussière et de clarté. Les particules tourbillonnaient autour de ma tête comme des étincelles argentées. Je me suis senti soudain emporté, corps et âme, en direction du rayon de lumière devenu irradiant. Et, perdant subitement tous repères, j'ignorais si j'étais encore dans l'église. Les particules de poussière se transformèrent peu à peu en des feux plus consistants, ralentirent leurs mouvements fébriles, s'éloignèrent les unes des autres, et je m'aperçus bientôt que je baignais dans une pluie d'étoile...
Je me retrouvai au coeur du cosmos.
Un silence majestueux régnait dans l'espace. Les étoiles étaient d'une beauté inouïe, elles brillaient d'un éclat inédit. Chacune d'elles formait un point éclatant d'une extrême pureté sur le fond noir, infini du ciel. Une paix immense m'envahit. Puis, venue du fond de ce ciel magnifique, une lueur se forma.
Elle apparut, d'abord floue, puis de plus en plus limpide, légèrement bleutée. Lentement, elle se mut en ma direction. Elle s'approchait. Et plus elle s'approchait, plus je sentais la fusion imminente entre cette lumière et moi. Et plus je sentais cette fusion sur le point de s'opérer comme une nécessité, une vérité, plus je vous reconnaissais à travers cette lumière.
Nous nous fondîmes l'un dans l'autre.
La rencontre fut foudroyante, éblouissante, cosmique. Divine. Nous accédâmes à la Vérité suprême en un éclair. Et chacun de nous vit dans l'autre le reflet de l'Eternité.

Je me suis réveillé sur le banc de l'église. M'étais-je évanoui, endormi ? Avais-je rêvé ? Je sortis de l'église, songeur, pour me retrouver sous un soleil aveuglant. Et je m'en allai.
J'ignore si j'ai rêvé ou non, mais il y a une chose que nul n'expliquera jamais : juste avant que je ne reparte, dans l'église la poussière est retombée. Et, bien que la disposition des choses dans ces lieux sombres rende impossible une telle probabilité à quelque heure et à quelque saison que ce soit, le rayon de lumière issu du vitrail est pourtant venu jusqu'au fond de l'église frapper la tête du Christ en bois.

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